Elles ont marqué Juziers

 

Du 5 au 31 mars 2022, en partenariat avec Juziers dans l’Histoire, la Municipalité de Juziers a organisé  une exposition en lien avec la Journée Internationale des droits des Femmes en mettant à l’honneur ces femmes ayant habité Juziers, qui ont exprimé leur talent dans des domaines tels que la politique, l’engagement, la résistance, les activités intellectuelles et artistiques, la littérature et la bienfaisance.

 

 

Juziers dans l’Histoire a établi, en accord avec la Mairie, la liste de ces célébrités, puis a élaboré pour chacune d’entre elles une biographie imagée.
Pendant la durée de l’exposition, ces biographies ont été affichés sur leur lieu de résidence sous forme de panneaux.
Le point d’orgue de l’initiative a été la balade, le 8 mars 2022, au cours de laquelle plus d’une centaine de Juziérois ont déambulé devant leurs lieux de résidence. Les membres de Juziers dans l’Histoire y ont commenté l’histoire de chacune de ces femmes. Les enfants de la classe de CM2 ont présenté le résultat de leurs travaux sur Simone Leduc Saint-Clair. La pluie n’a pas gâché la bonne humeur et l’entrain des petits et grands.

 

 

 

ROSE BILY  (1820 – 1893). Rentière – Hameau d’Ablemont

Rose BILY est née à Taden près de Dinan en 1820. Elle épouse le 9 août 1862 Louis Sept Dormant LEVIEIL. Après avoir travaillé à Paris, ces deux  »rentiers » de 42 ans se marient civilement à Juziers en 1862 et y achètent une maison au hameau d’Ablemont. Le couple n’aura pas d’enfant.

Le 17 mars 1893, elle fait son testament : « J’institue pour ma légataire universelle, la commune de Juziers, à la charge d’exécuter des legs qui précèdent et encore d’employer le montant de mon legs soit en revenu, soit en capital, à des œuvres d’utilité publique et communale, notamment pour les écoles et les chemins. » Ce don contribuera à la construction de la mairie-école. Elle décède dans sa maison le 21 mai et est inhumée civilement au cimetière de Juziers le 23 mai 1893.

La municipalité qui a en projet la construction d’une mairie avec d’un côté une école de garçons et de l’autre une école de filles se heurte au coût des travaux. Le legs considérable de Rose, 48 000 francs, permet la finalisation de ce projet ambitieux de 75 000 francs. La nouvelle mairie est inaugurée en septembre 1900. Il paraîtrait que ce soit le portrait de Rose qui se trouve accroché dans la mairie. La tombe de Rose et Louis LEVIEIL est surmontée d’une colonne coiffée d’un bonnet phrygien et porte comme inscription « La commune reconnaissante à ses bienfaiteurs »

 

PALMYRE COUTEUX  (1857 – entre 1926 et 1931). MARIE COUTEUX  (1883 – après 1936). Les Girouards

Palmyre Zénaïde Anaïde, fille d’Eugène Isidore LEVIEIL, maire de Juziers de 1888 à 1893, épouse François Désiré COUTEUX en 1882. Ce dernier fonde à Juziers une maison de commerce (épicerie et vins). Leur fille, Marie Augustine Désirée, naît le 24 mai 1883 à Juziers.

A la création de la ligne Argenteuil-Mantes, ils sont expropriés en 1889 par la société des chemins de fer et se retirent à Hardricourt. Désiré COUTEUX décède en 1916 et repose dans le caveau familial de Juziers.

En 1919, Julien BUSSON-BILLAULT, maire de la commune, propose d’ériger un monument aux morts sur la place de la Mairie. Il reçoit une proposition : Mme et Mlle COUTEUX souhaitent offrir à la commune un terrain d’environ dix ares, situé aux Girouards, pour y édifier ce monument. Elles posent comme condition que cet espace reste arboré en tant que jardin et porte le nom de « square Désiré COUTEUX ».

 

JACQUELINE DOYEN (1930 – 2006). Actrice – 2, rue de la Citerne

Jacqueline DOYEN est une actrice, née le 14 février 1930 à Paris 11ᵉ. Elle débute sur les planches à l’âge de 18 ans en s’inscrivant au Conservatoire d’art dramatique, où elle apprend le métier avec ses professeurs Jacques Weber et Julien Berthau.

Elle se spécialise dans les seconds rôles comiques et s’illustre dans les fameux dialogues de Michel Audiard. Apparaissant dans une dizaine de films, il lui faut attendre « Zazie dans le métro » et « Vie privée » de Louis Malle pour que sa carrière décolle réellement. Elle décroche alors un petit rôle dans « Fleur d’oseille » en 1968. Elle se retire pendant sept ans à Saint-Paul de Vence pour être antiquaire et restauratrice de meubles anciens, puis revient à Paris pour redevenir actrice. L’ami Audiard lui offre encore de tourner dans ses chefs-d’œuvre d’humour : « Comment réussir quand on est con et pleurnichard », « Le drapeau noir flotte sur la marmite », « Le cri du cormoran le soir au-dessus des jonques » … Principalement femme de théâtre, elle joue « Le dindon » dès 1983 durant 500 représentations, son plus grand succès.

Claude Berri, Philippe de Broca et Jean-Marie Poiré font appel à ses talents comiques. Entre théâtre et télévision, dont des épisodes de « Maigret », Jacqueline DOYEN devient une figure populaire. Elle tourne pour la dernière fois en 1994 et se retire à Juziers dans sa maison familiale. Elle s’éteint en 2006 et repose dans le cimetière de Juziers.

 

JANE GATINEAU  (1893 – 1993). Soprano – 7, rue de la Rivière

Née à Paris le 8 octobre 1893, Jane GATINEAU fait ses études musicales avec Mme Desrousseaux, élève de Charles Gounod et de Pauline Viardot. Elle débute à Paris en 1913 en concert, genre qu’elle ne cessera de cultiver tout au long de sa carrière. Elle parcourt la province, chante de nombreuses opérettes et son répertoire comporte notamment Mignon, Carmen, Les Noces de Figaro (Chérubin), Les Dragons de Villard […] Elle est la première voix chantée à être retransmise par la T.S.F. en 1919 et durant 20 années elle s’y fait entendre.

En 1922, Melle Jane GATINEAU, soliste mezzo-soprano des concerts Colonne, obtient un très vif succès lors d’une soirée artistique à la Maison Latine des Champs-Elysées. En 1923, le banquet annuel de la fête de l’Armistice de Juziers est suivi d’un opéra-comique assuré par Melle Jane GATINEAU et sa troupe. Elle organisera régulièrement d’autres concerts pour le plus grand plaisir de la commune. Depuis son enfance, elle vient passer ses vacances au 7 rue de la Rivière. Après la guerre de 1939-45, elle s’adonne à l’enseignement du chant.

 

LES SOEURS LANGUMIER (XIXème siècle). Institutrices – Rue aux bœufs

En 1835, la commune achète une maison rue aux Bœufs pour y établir l’école des garçons et la mairie avec ses archives. Pour se conformer à la loi de 1850 qui oblige les communes de plus de 800 âmes d’avoir une école spéciale pour les filles, François AUGER, maire, signe un bail en 1851 pour une habitation sise rue du Capron (aujourd’hui rue du Commerce). Cette école est transférée six ans plus tard rue aux Bœufs (la Poste – Janine VINS).

Par arrêté préfectoral, Adrienne Olympe Désirée LANGUMIER, (1836 – 1867) est nommée institutrice communale en 1858. Elle meurt prématurément à l’âge de 31 ans. Une plaque apposée sur un pilier de l’église témoigne de la reconnaissance des Juziérois envers leur jeune institutrice.

Sa sœur, Évelyna Joséphine, (1838 – 1917) lui succède. Elle y est rejointe par une autre de ses sœurs, Marie Antoinette (1844 – 1888). Cette dernière a été ajoutée sur l’épitaphe de l’église avec la mention « Elles ont passé en faisant le bien ».

 

SIMONE LEDUC dit SAINT-CLAIR  (1896 – 1975). Journaliste et romancière – 61 Route de Paris

Simone LEPLAT naît à Orléans le 25 février 1896. Elle fait ses études à la Sorbonne et sort diplômée ès Lettres. De son premier mariage avec Timoléon PASCALIDIS en 1918 naissent deux fils. Critique littéraire à « l’Intransigeant », elle écrit récits et nouvelles pour adolescents. En 1937, sous son nom de plume Simone SAINT-CLAIR, « Le Dalhia rouge », son premier roman, remporte le Grand Prix du Roman Populaire.

En 1940, elle se remarie avec Marcel LEDUC et ils acquièrent une villa à Juziers sur les berges de la Seine. Lors de l’occupation de la France, elle s’engage dans un réseau de renseignements. Arrêtée puis déportée au camp de Ravensbrück, libérée en 1945, elle apprend le décès de son fils cadet, Alain, tué en Alsace l’année précédente. Dès son retour, elle relate sa sinistre expérience dans un ouvrage couronné par l’Académie française : « Ravensbrück, l’Enfer des femmes ». En 1947, Claude, son fils ainé trouve la mort en Cochinchine. Cette nouvelle épreuve l’engage vers des romans plus ésotériques.

Simone LEDUC devient la première femme conseillère municipale à Juziers en 1953, fonction qu’elle occupe durant deux mandats. En 1967, elle intervient auprès d’André MALRAUX, ministre de la Culture, pour faire accélérer la restauration des vitraux de l’église Saint-Michel de Juziers. Simone LEDUC meurt le ler mars 1975. Elle est inhumée avec ses deux fils et son mari au cimetière communal.

 

LETGARDE  (915 – 981). Comtesse de Vermandois – Prieuré de Juziers

Fille de HERBERT II, Comte de Vermandois, de souche carolingienne, descendant de Charlemagne et de HILDEBRAND, de souche capétienne, LETGARDE naît en 915 à Saint-Quentin (02). Elle épouse en premières noces Guillaume Longue Epée, duc de Normandie en 935. En avance d’héritage, son père lui donne Juziers, Issou, Limay, Fontenay, Mantes-la-Ville, Arnouville et Auffreville. De ce mariage, elle n’a pas d’enfant. En 942, son mari est assassiné sur ordre de ARNOULD, Comte de Flandres et beau-frère de LETGARDE.

Dès 943, elle se remarie avec THIBAUT le Tricheur, Comte de Chartres, de Blois et de Tours. De cette union naissent cinq enfants. Il décède à l’âge de 62 ans en 975. Afin d’assurer dans l’au-delà son bonheur et celui des siens, elle donne par charte le 5 février 978, Juziers, Fontenay et Limay à la grande abbaye Saint-Père-en-Vallée de Chartres, abandonnant ainsi ses droits féodaux aux abbés. C’est avec LETGARDE que commence l’histoire de Juziers. Elle décède le 14 novembre 981 en son château de Chartres et est inhumée dans cette abbaye.

 

JULIE MANET (1878 – 1966). Fille et femme de peintre – Le château du Mesnil

Julie, fille de Berthe MORISOT et Eugène MANET, châtelains au Mesnil, naît le 14 novembre 1878 à Paris. Elle se plie donc avec grâce aux séances de poses et s’initie très tôt à la peinture en plagiant les tableaux de sa maman. Dans son entourage, Édouard Manet, son oncle, Auguste Renoir, qui lui donne des leçons, Degas et Monet favorisent son éclosion dans ce domaine. L’arrivée au Mesnil en 1892 permet à chacun de dresser le chevalet dans le parc du château : tendres scènes champêtres.

Hélas, bonheur de courte durée puisqu’elle devient orpheline à 17 ans. Mallarmé devient son tuteur. Elle reçoit à Paris, voyage avec ses cousines. Elle écrit son « journal de peintre » où figurent les plus illustres artistes de son époque et, enfin, après de longues années de recherches, publie le répertoire des œuvres de Berthe Morisot.

Le Mesnil vit cinq années de demi-sommeil et se réveille le 29 mai 1900 lorsque Julie épouse Ernest ROUART, peintre également. Le jeune couple partage désormais Paris avec Juziers. Paul Valéry rejoint le cercle familial. Si Ernest se consacre pleinement à la peinture, Julie expose quelque temps puis se voue à son rôle de maman puisque Julien, Clément et Denis voient le jour. Le couple a déjà acquis une « impressionnante collection ». Famille très pieuse appartenant à la communauté du Tiers-Ordre dominicain, Julie « Sœur Rose de Lima », rejoint Ernest « Frère Antonin » au cimetière de Passy en 1966.

 

BERTHE MORISOT (1841 – 1895). Peintre impressionniste – Château du Mesnil.

Berthe MORISOT nait le 14 janvier 1841 à Bourges, son père est préfet du Cher. La famille s’installe à Paris en 1852. Son éducation l’amène à se tourner vers la peinture en plein air. Elle s’entoure d’un cercle d’amis : Monet, Sisley, Degas, Pissarro, Renoir et pose pour Édouard Manet. Le 15 avril 1874, elle expose chez Nadar avec ses amis. Un nouveau terme est lancé : « l’impressionnisme », première exposition, première femme impressionniste.

La même année, elle se marie avec Eugène Manet, frère du célèbre Édouard. Leur fille Julie naît en 1878. Berthe tient salon en ajoutant Mallarmé parmi ses amis. Résidant à Mézy, elle découvre le château du Mesnil Saint-Laurent à Juziers qu’elle achète en 1891 lors d’une vente aux enchères. Quelques toiles célèbres immortalisent le domaine : poses dans le parc et surtout le célèbre pigeonnier que l’on peut apercevoir à travers le portail, cher au cœur des Juziérois.

Ce bonheur est de courte durée, quatre mois plus tard, Eugène meurt. Berthe se retire à Paris avec sa fille. Elle vient quelques fois peindre avec Julie et ses nièces de charmantes scènes d’intimité ou champêtres. En février 1895, elle contracte une mauvaise grippe en soignant Julie et décède le mois suivant. L’histoire du Mesnil ne s’arrête pas là, sa fille Julie lui redonnera une vie plus joyeuse.

 

CATHERINE OZANNE (1732 – 1773). Vigneronne – Hameau d’Haumont

Catherine OZANNE est née le 2 mars 1732 à Juziers. Issue d’une famille de vignerons, elle cultive des vignes sur la commune à Haumont et aux Grandes Vignes. « Elle piochait ses terres et faisait du bon vin. »

En 1971, elle est accusée du meurtre de son enfant noyé dans la Seine. L’instruction se déroule dans la prison de Juziers jouxtant l’église. L’infanticide étant reconnu lors de son procès du 4 mai 1773, elle est transférée au bailliage de Meulan qui la condamne à mort. Elle fait appel au Parlement de Paris, lequel confirme la sentence. Catherine Ozanne est condamnée à être pendue sur la place publique de Meulan le 13 septembre 1773, « pour avoir celé sa grossesse et son enfantement, avoir ensuite pris son enfant, l’avoir porté et jeté au bord de la rivière et par-là occasionné sa mort ». (Extrait de l’arrêt de la cour de Parlement). Marcel LACHIVER, historien régional, en a fait un roman historique, « Une fille perdue », paru en 1999.

 

 

JANINE VINS  (1932 – 2018). Secrétaire – Rue de la Poste

Née le 6 décembre 1932, Janine VINS passe son enfance à Juziers. Ses parents, Pierre et Clotilde, habitent ici jusqu’à leur décès. Son père est boucher et fait les marchés notamment à Gennevilliers et à Saint-Ouen. Pendant ce temps Janine VINS réside et travaille à Paris. Elle est secrétaire, sténo dactylo dans une compagnie d’assurance puis au ministère des Armées.

Ce n’est qu’à la retraite qu’elle s’installe à Juziers pour s’occuper de ces derniers. Elle reste plutôt discrète et renfermée sur elle-même. Nous pouvons la voir courbée dans son jardin où elle arbore un chapeau, ou bien chez le coiffeur qu’elle fréquente régulièrement. Parfois, elle fait une balade dans la rue de la Poste, souvent la tête baissée. Son passe-temps préféré est la lecture, principalement les livres de guerre. De ce fait, elle fréquente régulièrement la bibliothèque. Elle séjourne dans une maison de retraite où elle décède le 12 mai 2018 à l’âge de 86 ans.

Par un testament en date du 06 juin 2008, elle fait de la commune de Juziers sa légataire universelle par notification à un notaire de Limay. Elle souhaite que la municipalité gère la totalité de ses biens immobiliers et remette à différentes associations ses liquidités. Après s’être nommée Grande rue, rue aux Bœufs, puis rue de la Poste, désormais la rue principale qui traverse Juziers se dénomme rue Janine VINS depuis septembre 2019.